Actualité énergie

23 mai 2024

L’opération spécifique CEE, une aide sur mesure pour les industriels

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Métallurgiste regardant du métal liquide à très haute chaleur

Les process industriels sont souvent lourds et gourmands en ressources, qu’il s’agisse d’électricité ou de gaz. En France, les industriels se placent ainsi au premier plan des consommateurs d’énergie : le secteur est le 3e du pays, derrière le transport et le résidentiel. En 2022, la consommation finale énergétique de l’industrie s’élevait à 285 TWh (données corrigées des variations climatiques éventuelles). Par conséquent, elle est aussi en première ligne pour agir en faveur de la décarbonation et de la transition énergétique. 

Pour cela, en plus de l’intégration d’énergies nouvelles et renouvelables, comme l’hydrogène, l’industrie œuvre dans une démarche de sobriété et d’efficacité. Sa consommation d’énergie avait d’ailleurs globalement diminué de 9 % en 2022. Pour l’aider à le faire, des fiches standardisées de Certificats d’économies d’énergie (CEE ou C2E) existent. Elles permettent de financer des actions d’économie d’énergie ou d’optimisation des performances. Il s’agit notamment d’opérations concernant le bâtiment ou les utilités. Sur ce type d’investissements fléchés, les acteurs obligés (fournisseurs d’énergie) ou délégataires des CEE accompagnent directement les industriels pour leurs démarches.

Cependant, il ne s’agit que d’un volet parmi le champ des possibles des CEE. D’autres opérations, dites spécifiques, permettent d’agir sur des gisements d’économies plus importants et non standards.

Une opération spécifique pour une aide adaptée

Les aides CEE sont connues et sont devenues incontournables, notamment via les 226 fiches d’opérations standardisées réparties par secteur. En tant qu’industriel, vous pouvez réduire votre investissement dans une opération de récupération de chaleur, de condensation frigorifique, etc.

Cependant, dans l’industrie, les investissements les plus efficaces ne se situent pas dans les utilités mais dans le process en lui-même – lignes de production, fours de chauffe, équipements de pulvérisation… Les utilités représentent généralement un tiers de la consommation, les deux tiers restants reposant sur les outils de process. 

Si ces outils n’ont pas de fiche associée, l’obtention de certificats d’économie d’énergie demeure possible. C’est tout l’intérêt des opérations spécifiques, qui viennent aider sur des investissements lourds, durables et novateurs. De plus, un site PNAQ (Plan national des quotas carbone) générant des économies sur sa consommation thermique ne peut bénéficier des CEE standardisés. Il lui est cependant possible de monter un dossier pour une opération spécifique – à condition d’être certifié ISO 50001 et d’entrer dans les critères d’éligibilité.

Le financement de l’opération spécifique : un dossier complexe avec des critères d’éligibilité

Le dossier à rendre pour une opération spécifique est cependant beaucoup plus complexe à constituer qu’un dossier classique CEE. Cette fois-ci, il faut entrer dans une démarche qui nécessite une étude préalable, généralement un audit énergétique. En effet, les critères d’éligibilité sont nombreux et relativement contraignants. Ils seront contrôlés par le Pôle national des certificats d’économie d’énergie (PNCEE). 

Il faut, en particulier, pouvoir démontrer que le temps de retour brut sur l’investissement est supérieur à trois ans. Dans l’industrie, il faut donc être prêt à agir sur des postes habituellement énergivores. Il est nécessaire aussi que l’opération porte sur une solution novatrice. Elle ne doit pas induire d’augmentation des émissions carbone… ni correspondre à une obligation règlementaire. Enfin, il doit s’agir d’une opération sur un site clairement établi. 

Autrement dit, l’opération spécifique étant un acte fort, il faudra veiller à ce que toutes les parties prenantes soient impliquées. Comme pour la mise en œuvre de l’ISO 50001, l’intégration d’une politique d’efficacité énergétique repose aussi sur la constitution d’une culture d’entreprise dédiée.

Témoignage du groupe Terreal sur ses opérations spécifiques CEE menées avec Eqinov

Partenaire de Collectif Énergie, Eqinov, en tant qu’acteur de la performance énergétique, donne l’impulsion à des projets d’efficacité énergétique et à leur financement pour des entreprises industrielles ou tertiaires. Dans ce cadre, Eqinov a notamment accompagné le groupe Terreal, sur des opérations spécifiques CEE. 

« Nous sommes une ETI assez fortement consommatrice de gaz et émettrice de CO2, explique Bernard Peuch, cef de projet pour ce fabricant de tuiles et briques en terre cuite. Par conséquent, depuis 2016, nous avons établi une feuille de route bien gérée, en nommant un directeur de l’énergie, en effectuant des audits énergétiques de chacun de nos sites et en identifiant sur chaque site des projets d’économie d’énergie. Nous avions une approche plutôt site par site, qui nous a menés sur trois projets d’investissement de décarbonation. 

Pour pouvoir financer ces projets majeurs, nous avons dû faire certifier ces sites ISO 50001 avant de faire appel à des CEE spécifiques. Dans ce cadre, en Bourgogne-Franche-Comté, en 2021, nous avons réalisé la mise en place d’un échangeur thermique sur les fumées d’un four à tuiles. Nous avons ainsi pu passer les fumées de 200 °C à moins de 80 °C. Cela génère de l’air chaud qui alimente un broyeur pour sécher nos argiles. Cela représente 9 GWh de gaz annuel et 1675 tonnes de CO2 par an. C’est un projet novateur, car nous descendons les fumées en dessous du point de rosée acide. Il fallait un échangeur très particulier, pour lequel nous avons choisi une technologie de tubes en verre vêtus de téflon afin d’éviter les risques de corrosion. 

L’autre caractéristique a été le montage financier. Nous avons pu trouver une bonne solution pour financer son coût de 1,9 million d’euros. Nous avons obtenu 10 % de subvention de la région et 35 % de l’Ademe via le fonds Chaleur et enfin 30 % par les CEE spécifiques qui ont été signés avec Eqinov. 

Le planning du projet a commencé par une étude en 2020. La mise en route s’est faite en 2021. Elle a été suivie à la fin de la même année par une mise en exploitation. Notre dossier de comptage CEE est sur la table du PNCEE depuis plusieurs mois déjà. Nous devrions bientôt avoir le paiement final. Mais sans la certification ISO 50001 et le financement CEE spécifique, nous n’aurions pas pu conduire ce projet. Deux autres sont désormais en cours de réalisation, pour 2024, et trois autres sont planifiés pour les années suivantes. » 

Découvrez le témoignage de Terreal lors du webinaire organisé par Eqinov

Adoptez une démarche en cinq temps pour mener votre opération spécifique

Compte tenu de la complexité de la démarche, il est important d’avoir en tête les grandes étapes nécessaires à une opération spécifique. Cela permet d’impliquer votre entreprise depuis l’identification d’une économie d’énergie jusqu’à l’obtention d’une aide ciblée. Le laps de temps qui sépare ces deux moments peut varier en fonction de la complexité du projet et par conséquent du volume d’économie visé. Il est estimé à deux ans maximum

  • L’étude préalable. Avant de se lancer dans une opération spécifique, vous devez avoir identifié vos dépenses via un audit énergétique. Cela sera d’autant plus utile que cet audit déterminera la situation initiale de vos consommations. 
  • L’étude de faisabilité. Grâce aux données recueillies et l’identification de gisements d’économies d’énergie, une étude prévisionnelle des gains énergétiques possibles et du montant des CEE associables est menée.
  • Les travaux, soit la mise en place de l’investissement issu de l’étude de faisabilité. D’autres financements sont évidemment possibles pour accomplir cette phase, comme le fonds Chaleur de l’Ademe ou l’appel à des aides régionales. 
  • Le calcul de vos dépenses à la suite de ces travaux, le mesurage des gains énergétiques que vous avez réellement accomplis et enfin la constitution de votre dossier technique final.
  • Le versement des CEE à la suite de l’instruction et de la validation de votre dossier auprès du PNCEE.

Partenaire de Collectif Énergie, Eqinov accompagne les industriels dans les opérations spécifiques

Sébastien Escolier, directeur commercial pour Eqinov, précise comment un industriel peut bénéficier de son expertise pour assurer le financement d’un projet de décarbonation et d’économie d’énergie : « Sur une opération spécifique, Eqinov cadre le projet en vérifiant qu’il répond aux critères d’éligibilité et qu’il pourra être validé par le Pôle national des CEE. Pour que le dossier soit complet, on accompagne les industriels dans toute la constitution de leur projet, de la définition de la situation initiale à la valorisation finale des CEE après leur livraison, à un prix fixe ou à un prix indexé au marché.

C’est un process qui est généralement long, ajoute Sébastien Escolier. Il n’y a pas de valorisation avant un an, minimum, et cela nécessite donc un travail de longue haleine de conseil, d’ingénierie d’affaires ou technique… Il est souvent nécessaire d’être accompagné par des experts en énergie. Actuellement, Eqinov travaille ainsi sur une dizaine de dossiers pour des opérations spécifiques. Elles représentent au total un volume d’économies d’énergie de 1,6 TWh cumac. Il y a tout type de projets, allant de plus de 500 GWhc et d’autres autour de 50 GWhc, voire 20 GWhc pour de la récupération de chaleur sur des compresseurs d’airs sur des sites PNAQ. »