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8 octobre 2024

Flexibilité à la hausse : une énergie décarbonée et moins chère pour les entreprises

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Lignes à haute tension installées à proximité d'un parc éolien

Avec la montée en puissance des énergies renouvelables non pilotables – l’éolien et le solaire –, la flexibilité est devenue un enjeu majeur pour le réseau électrique. Elle ne concerne plus seulement les périodes de pic de consommation pendant l’hiver, lorsque les chauffages s’allument. Le problème se pose également pour les pics de production, au cœur de l’été, lorsque vent et soleil se cumulent… et que la consommation est en baisse. 

Quelle solution face à ce constat ? Depuis le 1er juillet 2023, Acciona Energía expérimente avec l’accord de la CRE le principe de la flexibilité à la hausse. 

Marwane Qasbaoui, directeur de la flexibilité électrique pour Acciona Energía, explique à Collectif Énergie les fondamentaux et les avantages de cette nouvelle proposition. 

Pouvez-vous présenter le principe de la flexibilité à la hausse, que vous expérimentez depuis un peu plus d’un an avec la CRE ? En quoi s’agit-il d’une nouveauté sur le marché de l’électricité ?

Il faut tout d’abord revenir sur le principe de la flexibilité électrique. Il s’agit de s’adapter aux variations de la production et de la consommation sur le système électrique pour en préserver le bon équilibre. Pour la stabilité du réseau, il est essentiel que l’offre et la demande soit égales. 

La situation à risque la plus connue, c’est lorsque la consommation est très importante et qu’il n’y a pas assez de production pour répondre à cette demande. On peut alors soit baisser la consommation, par exemple avec le mécanisme de l’effacement, soit mobiliser de nouvelles ressources de production – qui seront principalement des énergies fossiles, comme du gaz ou du charbon. 

La situation inverse existe également, avec une production qui est parfois plus abondante que la demande. Il y a alors deux possibilités : soit quelqu’un peut consommer cette énergie supplémentaire immédiatement, soit on peut réduire la production instantanément avec une modulation des centrales électriques. 

Cette action sur la production se fait depuis des décennies. Les centrales nucléaires peuvent être modulées, même si leur réactivité pour cela est assez longue. Les centrales à gaz sont plus réactives, mais utilisent une énergie fossile qui émet beaucoup de CO2. 

La nouveauté, aujourd’hui, c’est d’agir sur la consommation pour préserver l’équilibre. Afin d’aider le réseau électrique, nous proposons de faire une flexibilité à la hausse, c’est-à-dire consommer plus sur des heures ciblées et spécifiques de forte production. Au lieu d’arrêter des centrales bas carbone, nous allons chercher des consommateurs d’énergie capables d’absorber cette électricité au meilleur moment. Il y a d’ailleurs un véritable intérêt à consommer sur ces heures puisque les prix y sont très bas, voire négatifs.

Comment peut-on avoir des prix négatifs sur le marché de l’électricité ? 

Un prix négatif est un signal prix envoyé par le marché. Il résulte du croisement des courbes de l’offre et de la demande. Cela arrive notamment en conséquence de l’essor des productions renouvelables sur le réseau, avec des journées qui peuvent être à la fois ensoleillées et venteuses sur des périodes de trop-plein des stocks hydrauliques, ce qui nécessite également l’activation des barrages hydroélectriques. La production électrique dépasse alors largement la consommation et les prix s’effondrent, puisqu’une partie du volume d’électricité n’a pas été vendue. 

En effet, sans consommateur, les prix deviennent négatifs car il faut absolument trouver des acheteurs. Cela tient du besoin d’équilibre du réseau afin d’éviter les risques de blackout, qui surviennent également en cas de surcharge. Dans de tels contextes, la flexibilité à la hausse est essentielle. 

À qui s’adresse cette flexibilité à la hausse ? Quelles sont les entreprises qui peuvent en bénéficier ? 

Pour le moment, nous nous adressons principalement aux industries. Cependant, nous avons l’ambition de généraliser cette offre auprès du secteur tertiaire, où la flexibilité à la hausse peut également présenter un intérêt. En décalant le chauffage ou la climatisation des bureaux, par exemple, il est possible de consommer au moment où la production est décarbonée et de stopper lorsque la demande augmente. 

Dans notre expérimentation en cours, nous travaillons avec une industrie spécialisée dans la production de fonte. Le client a d’abord étudié comment son activité pouvait être adaptée et décalée en milieu de journée ou pendant la nuit, pour ensuite pouvoir agir lorsque nous lui indiquons des prix bas sur le marché. Cela nécessite bien sûr des ressources humaines et une organisation spécifique, comme des industriels en 3×8 ou en 2×12. 

Comment la flexibilité à la hausse s’articule-t-elle avec le principe de l’effacement électrique ? 

Ce sont deux manières d’agir sur les process industriels qui vont bien ensemble. Ainsi, nous avons un client qui fait de la flexibilité électrique en variant sa consommation à la hausse ou à la baisse selon les saisons, en tenant compte de la production d’électricité. Un autre le fait en simultané, grâce à des réservoirs d’eau. Il les remplit lorsque l’électricité est bon marché, puis les utilise lorsque les prix remontent sans avoir alors besoin de pomper. 

Quels sont les bénéfices pour un client ? 

En surveillant le marché du jour pour le lendemain – le marché spot –, il est possible d’optimiser sa consommation en favorisant au passage les énergies bas carbone. L’intérêt est donc directement financier, avec une électricité moins chère grâce à l’évolution des prix en temps réel. 

En tant qu’agrégateur sur le réseau, nous pouvons acheter pour eux cette électricité. Pour des clients qui ont un prix fixe, nous leur permettons d’avoir accès à ce marché spécifique et aux périodes plus favorables pour acheter. C’est un fonctionnement avec un système proche d’une alerte, en nous adaptant aux clients. 

Aujourd’hui, il s’agit encore d’un bac à sable réglementaire, auquel nous sommes partie prenante avec la CRE, RTE et Enedis. Nous participons ensemble à cette expérimentation pour étudier le mécanisme de la flexibilité à la hausse et démontrer l’intérêt que cela représente pour nos clients et pour le réseau d’électricité. 

La flexibilité à la hausse semble renforcer l’idée d’une saisonnalité de plus en plus marquée des énergies. Comment les entreprises peuvent-elles s’adapter à cette nouvelle donne ? Faut-il s’attendre à des prix davantage différenciés entre l’hiver et l’été ?

Il y a une part de responsabilité des fournisseurs sur cette question. Leurs prix doivent refléter les nouvelles variations du système électrique qui font suite à l’intégration massive des ENR. Les fournisseurs sont indispensables pour proposer des offres globales qui y correspondent. Il faut aussi pour cela que le marché de l’énergie soit capable de proposer des produits énergétiques qui reflètent ce nouvel équilibre – ce qui est porté par ailleurs par la réforme éventuelle des heures pleines et des heures creuses. 

Acciona Energía, en tant qu’agrégateur d’électricité, s’imbrique dans ce système-là. Notre rôle est d’optimiser encore davantage les prix du marché, en permettant aux industriels et autres entreprises tertiaires de capter les heures précises d’une électricité moins chère et décarbonée. Nos prévisions grâce au spot se font en temps réel, quand le fournisseur proposera des offres génériques sur deux ou trois ans. 

Lors de la crise de l’énergie en 2022, le gouvernement a insisté sur la responsabilité de chacun en mettant en avant le principe de sobriété énergétique. Cette incitation à la hausse de la consommation n’est-elle pas contradictoire avec ce discours politique de baisse des usages énergétiques ? 

La flexibilité à la hausse va dans le sens de la sobriété. Ce signal prix grâce au marché spot permet d’indiquer lorsqu’une énergie décarbonée est très largement disponible sur le réseau. Il faut la consommer pour qu’elle ne soit pas perdue, pour les utilisateurs comme pour les producteurs – qui ont consenti à des investissements massifs pour ces installations photovoltaïques ou éoliennes. 

L’idée de la flexibilité à la hausse est de consommer au bon moment et d’éviter des pertes. C’est une forme de sobriété, puisque les clients déplacent leur consommation et ne consommeront donc pas lorsque la demande augmente. C’est comme déplacer le lancement d’une machine à laver à son domicile. La sobriété énergétique, c’est choisir de consommer au moment le plus opportun. 

La flexibilité à la hausse entre-t-elle en concurrence avec le développement des batteries pour stocker ce surplus d’énergie qui peut arriver sur les réseaux ?

En fait, avec la flexibilité à la hausse, nous permettons aux entreprises d’agir comme des batteries virtuelles. Elles jouent ce rôle grâce à un investissement humain et organisationnel, mais sans l’investissement physique et matériel, plus coûteux. Ce qui nécessite également moins d’extraction de ressources naturelles.

 

Acciona Energia accompagne les entreprises vers des solutions favorables aux énergies renouvelables

Retrouvez des informations complémentaires sur la flexibilité à la hausse sur le site d’Acciona Energía, partenaire de Collectif Énergie pour proposer des solutions novatrices aux entreprises dans le développement de la flexibilité électrique et des énergies renouvelables via ce lien.