Actualité énergie

17 mai 2022

Arenh : histoire et réforme souhaitable pour votre budget énergie

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L’Arenh, Accès Régulé à l’Énergie Nucléaire Historique, est un mécanisme permettant aux fournisseurs d’énergie alternatifs de faire bénéficier à leurs clients d’une partie de l’énergie produite par les installations nucléaires en France. Chaque année, 100 TWh sont ainsi mis à leur disposition à un tarif fixé à 42 €/MWh.

En août 2023, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a révisé le coefficient de bouclage de l’Arenh. À compter du 1er janvier 2024, il passe à 0,844 au lieu de 0,964, soit une baisse automatique de 12,45 %… qui ne s’applique qu’aux contrats signés après la publication de cette décision au Journal officiel.

Pour 2024, la CRE a reçu 130,45 TWh de demande de volume Arenh de la part des fournisseurs dits alternatifs. Cette demande poursuit sa baisse progressive depuis deux ans, ce qui s’explique pour 2024 par la révision du coefficient de bouclage. Elle était ainsi inférieure à l’année 2023 (148,87) et à l’année 2022 (160,05).

Cependant, depuis 2018, ce volume dépasse celui accordé dans le cadre de l’Arenh. Ce dépassement est devenu la règle. Les fournisseurs doivent donc acheter sur le marché de gros le complément – c’est le taux d’écrêtement. Cela engendre des augmentations de tarif parfois non prévues, notamment ces dernières années marquées par des prix records en fin d’année.

Une chose est certaine, le système actuel ne satisfait pas grand monde : 

  • EDF y voit un frein à son développement ;
  • Les fournisseurs alternatifs ne perçoivent pas les quantités d’électricité escomptées pour leurs parcs client ;
  • Et les consommateurs finaux se retrouvent avec des prix fluctuants.

Par conséquent, l’Arenh doit prendre fin au 31 décembre 2025. 2026 arrive à grands pas et l’Arenh tel que nous le connaissons va faire peau neuve. Les discussions sont encore en cours quant à la forme que prendra sa révision.

Quelles étaient les ambitions de l’Arenh à sa création ? Comment fonctionne l’Arenh aujourd’hui ? Allons-nous vers (encore) plus de complexité ? Quelle réforme est souhaitable pour le budget de votre entreprise ? Regardons ensemble ce mécanisme alambiqué pour enfin y voir un peu plus clair sur le marché de l’électricité nucléaire français.

Qu’est-ce que l’Arenh ?

L’Arenh, créé par la loi Nome (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) en 2010, permet aux fournisseurs d’électricité alternatifs d’accéder à 25 % de la production nucléaire d’EDF.

Tous les ans, depuis 2010, EDF doit céder à « prix coûtant » une partie de sa production à la concurrence.

Quel est le montant de l’Arenh et son plafond en 2024 ?

En 2024, le plafond de l’Arenh est maintenu à 100 TWh et son montant de 42 €/MWh.

Dans le cadre du mécanisme d’Arenh, la CRE a reçu pour l’année 2024 un total de demandes représentant 130,45 TWh d’électricité de la part de 102 fournisseurs (hors fourniture des pertes des gestionnaires de réseaux et hors filiales d’EDF).

Les informations à retenir pour l’Arenh 2024 :

  • Au 1er janvier 2024, le coefficient de bouclage de l’Arenh passe à 84,4 % au lieu de 96,4 %, soit une baisse de 12,45 % du droit Arenh des consommateurs ; 
  • Depuis 2022, les fournisseurs sont priés de se justifier du montant de leur demande ;
  • La CRE constate que les fournisseurs ont été davantage en mesure de justifier la cohérence du volume Arenh demandé ;
  • La commission a corrigé la demande de 4 fournisseurs seulement, pour un volume de 0,4 TWh, soit un total de volume Arenh corrigé à 130,41 TWh et un taux d’attribution de 76,68 % ;
  • Enfin, le taux d’écrêtement de l’Arenh pour 2024 sera donc de 23,32 %. En 2023, il était de 32,57 % (et serait descendu à 22,98 % avec le nouveau coefficient de bouclage fixé par la CRE) ;
  • Pour les consommateurs qui ont souscrit à une assurance écrêtement ou équivalent avant le mois de septembre 2023, il faudra prendre en référence un écrêtement suivant l’ancien coefficient de bouclage (soit 32,86 %) afin de calculer le volume restant soumis à écrêtement.

Attention à ce dernier point ! Il signifie donc que tous les consommateurs qui ont souscrit à un contrat d’électricité comprenant une part d’Arenh avant septembre 2023 ont pour base de calcul l’ancien coefficient de bouclage… et un taux d’écrêtement réajusté de 12,45 %, soit 32,86 %.

Ainsi, le volume Arenh demandé par les fournisseurs alternatifs pour l’année 2024 est quasi identique à celui de 2023 si l’on prend en compte la baisse du coefficient de bouclage. Cette demande relativement stable de la part des fournisseurs peut s’expliquer par les raisons suivantes :

      • L’anticipation par les fournisseurs d’une baisse de la consommation d’électricité en 2024, avec un travail important fourni sur la sobriété et l’efficacité énergétique des entreprises ;
      • L’inflexion récente à la baisse ces derniers mois des parts de marché des fournisseurs alternatifs sur le marché de masse ;
      • Le pouvoir de contrôle des demandes d’Arenh conféré à la CRE par le décret du 29 octobre 2022 a pu inciter la majorité des fournisseurs à faire une demande d’ARENH au plus près de leur portefeuille de consommateurs, dans un contexte où la quantité d’électricité allouée aux fournisseurs au prix de 42 €/MWh est restée plafonnée à 100 TWh pour l’année 2023.
      • Un repli des fournisseurs alternatifs qui s’explique aussi par l’attractivité du tarif réglementé de l’électricité, devenu plus intéressant pour les petites entreprises ou les artisans après la mise en place du bouclier tarifaire. 
      • Ces clients ont également pu quitter leur fournisseur d’énergie précédent. La révision des grilles de tarifs incluant de l’Arenh, mais sans engagement côté consommateur, a provoqué des départs au profit du tarif réglementé.

Dans quelles conditions les fournisseurs alternatifs peuvent-ils bénéficier de l’électricité nucléaire d’EDF ?

Quand ? Chaque année, les fournisseurs qui le souhaitent communiquent leur besoin en énergie, déterminé par leur parc client, auprès de la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie). Ils doivent le faire au plus tard le 16 novembre (inclus).

Quelle quantité ? La CRE limite l’électricité disponible à 100 TWh (les fameux 25 %).

À quel prix ? 42 €/MWh.

Comment les entreprises peuvent-elles profiter d’Arenh ?

Toutes les entreprises n’ont pas le droit au même pourcentage d’ARENH. Cela dépend du profil de consommation du site. En effet, il existe des heures dites « Arenh » qui vous rendent éligibles à cet accès :

  • Heures creuses d’avril à juin et de septembre à octobre ;
  • Heures comprises entre 1 h et 7 h en semaine ;
  • L’ensemble des heures les samedis, dimanches et jours fériés.

C’est donc sur cette base de consommation, en plus d’un calcul prévu dans les textes encadrant le dispositif, qu’une partie de l’électricité consommée par une entreprise est éligible à l’Arenh.

Quelles étaient les ambitions initiales de l’Arenh ?

70,6 % du mix énergétique français est dominé par le nucléaire et c’est EDF qui exploite les centrales qui produisent cette électricité.

Cette situation confère un avantage indiscutable en tant que producteur et fournisseur. Il faut donc redistribuer la « rente nucléaire ».

L’objectif de l’Arenh est donc de permettre aux consommateurs d’accéder à cette rente par l’intermédiaire des fournisseurs alternatifs en ayant des prix stables.

Presque tous les fournisseurs en France font appel à l’Arenh mais ce n’est pas obligatoire. Certains fournisseurs (peu) s’en passent et ne se fournissent qu’auprès de producteurs d’énergie 100 % renouvelable.

Pourquoi l’Arenh ne fonctionne plus ?

Depuis 2018, les livraisons en électricité sont en situation d’écrêtement ; c’est-à-dire que le volume demandé par les fournisseurs alternatifs est supérieur aux 100 TWh disponibles.

L’Arenh ne pouvant couvrir leurs besoins en énergie, les fournisseurs vont acheter tous ensemble et sur la même courte période (15 jours en décembre) le volume restant sur des marchés de gros. Les tarifs y seront mécaniquement élevés. Les fournisseurs ne peuvent donc satisfaire leurs parcs client.

Les consommateurs ne bénéficient donc plus de tarifs stables initialement désirés par la CRE. C’est une peine d’autant plus lourde pour les entreprises qui, à un mois du début de l’année, ne peuvent pas anticiper pour répercuter une telle hausse sur le coût de leurs produits.

EDF s’estime grand perdant des conséquences de l’Arenh en estimant que le prix fixé à 42 €/MWh est insuffisant pour envisager le financement de nouveaux réacteurs.

EDF, fournisseurs, consommateurs : tous en ont gros.

En attendant 2026, EDF teste la vente d’énergie nucléaire aux enchères 

En attendant le résultat des négociations avec le gouvernement, EDF a testé un premier mécanisme de vente de son énergie nucléaire après le 31 décembre 2025 en mettant en vente aux enchères 100 MWh pour 2027 et 2028. 

À travers cette expérimentation, EDF souhaite donner de la visibilité à ses clients. Ce test, sur un petit volume, est en cours et en attente de retours pour voir si la demande existe et si le prix de vente peut être suffisamment intéressant pour l’entreprise publique et les consommateurs. 

Au 3 octobre 2023, sur les 10 enchères lancées, une seule avait été fructueuse pour de l’électricité à livrer en 2028 à 86 € du MWh. 

L’Arenh après 2026 : ouverture aux CFD grâce à la réforme du marché européen de l’énergie et prix moyen de 70 €/MWh

Les CFD au service du nucléaire 

Les 27 États membres de l’UE sont parvenus à un accord sur la réforme du marché européen de l’énergie fin octobre 2023. Cet accord fait suite à la demande de la Commission européenne de modifier le marché afin d’assurer la compétitivité des entreprises sur son territoire et permettre la signature de contrats à moyen et long termes. 

La France est parvenue à défendre son modèle de transition énergétique faisant une large place à l’énergie nucléaire. Ses installations, existantes et à venir, pourront faire l’objet de « contrats sur la différence » (CFD en anglais). Ce type de contrat permet la mise en place d’un corridor de prix, avec un tarif plancher et un tarif plafond. Cependant, les négociations entre Bruxelles et Paris, en particulier pour les actifs existants, vont continuer en fin d’année 2023 et en 2024. 

Un prix moyen de 70 €/MWh pour les consommateurs 

Quelques semaines plus tard, le 14 novembre 2023, le gouvernement a rendu public l’accord trouvé avec EDF pour le mécanisme qui doit prendre la suite de l’Arenh à compter de début 2026. Le futur prix de l’électricité nucléaire a été fixé autour d’un tarif moyen de 70 €/MWh. Ce système s’appuie en particulier sur une redistribution progressive vers le consommateur (et non vers le fournisseur), avec deux seuils. Aux alentours de 78-80 €/MWh, 50 % de la rente sera captée. Au-delà de 110 €, ce pourcentage monte à 90 %, limitant ainsi la volatilité des tarifs pour le consommateur.  

Toute la production d’électricité nucléaire par EDF est concernée par ce nouveau tarif, à l’inverse du volume Arenh précédemment en place. Il n’y aura donc pas de phénomène d’écrêtement sur la fin d’année, lorsque les tarifs sont au plus haut. 

Les conditions d’application, les critères pour la vente aux fournisseurs alternatifs et les règles de restitution vers les clients doivent encore être détaillés, notamment pour savoir s’il s’agira bien d’un geste uniforme. Cela pourrait simplifier le mécanisme mais retirerait l’incitation à la consommation sur les « heures Arenh », pendant l’été. 

Dans cette réforme, fidèles à nos principes du collectif, nous espérons une décision finale qui puisse satisfaire tous les acteurs.

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