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13 juillet 2022

Revue mensuelle de juin et de début juillet 2022 : vers la nationalisation d’EDF

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Une actualité forte en ce début d’été

Nous avons préféré prendre le recul nécessaire sur ce mois de juin ainsi que cette première semaine de juillet intenses en actualité marché afin de vous proposer une revue mensuelle encore plus riche d’analyses.

Charbon

Une variation mensuelle de près de 20 % dans le contexte du redémarrage des centrales à charbon en prévision d'un hiver 2022/2023 tendu.

CO2

Un marché stable et sans dynamisme aux alentours des 82 €/MWh.

Pétrole

En baisse de près de 8 % sur un mois anticipant une possible récession ainsi qu'une demande moindre.

Production nucléaire

Une disponibilité nucléaire au plus bas avant une reprise progressive attendue à partir de septembre 2022.

Température

Alors qu'une première phase de canicule a eu lieu autour du 17 juin, la suivante est attendue à partir du 13 puis du 18 juillet 2022. Le mois de juin a été parmi les 3 mois les plus chauds enregistrés depuis 1900. Six des mois de juin les plus chauds ont été enregistrés durant les dix dernières années.

Drivers

Analyse et chiffres clés des marchés en France

Électricité

Le CAL BL 2023 a démarré le mois de juin à un prix de 307,53 €/MWh et s’est clôturé vendredi 1er juillet à 364,29 €/MWh, soit une hausse de 18,46 %.

L’augmentation s’est accélérée la semaine suivante à 26,27 % pour atteindre un prix de 460 €/MWh le 8 juillet 2022, soit une variation totale de 49,58 %.

Court-terme : les marchés ont connu une première semaine de Juillet très dense alimentant un mouvement haussier déjà impressionnant depuis le début juin 2022. Si la cotation Cal 2023 connait une augmentation de près de 18 % sur le mois de juin 2022, la seule semaine de juillet passée accélère la dynamique par une nouvelle salve de près de 26 % portant la variation totale à près de 50 % en l’espace de 40 jours.

La cotation Q4-2022 cristallise les inquiétudes sur la stabilité du système électrique cet hiver et accuse une progression de près de 91 %, portant le prix du Peakload à près de 1750 €/MWh sur cette période. L’écart avec les pays voisins et notamment l’Allemagne se creuse puisque les différences de prix sont particulièrement nettes sur les échéances dites « à risque » comme Q4-2022 et Q1-2023 anticipant un isolement du système électrique français en hiver du fait d’une capacité de production intérieure trop faible et d’interconnexions électriques à l’import déjà saturées.

Long-terme : les cotations 2024 et 2025 accusent également une hausse de 17 % et 7 % sur la période de 40 jours mais dans une proportion moindre et par effet de contagion par les échéances plus proches. Le niveau de prix européen reste relativement homogène sur le long-terme.

Gaz

 

Le TTF 2023 a démarré le mois de juin à un prix de 80,33 €/MWh et s’est clôturé vendredi 1er juillet à 108 €/MWh, soit une hausse de 34,45 %.

L’augmentation a légèrement diminué la semaine suivante à 30,38 % pour atteindre un prix de 140,81 €/MWh le 8 juillet 2022, soit une variation totale de 75,29 %.

[NDLR : nous enrichissons, depuis peu, notre note de marché avec l’évolution hebdomadaire du prix PEG puisque ce dernier est actuellement plus intéressant que le TTF]

Le prix PEG CAL 2023 a ouvert mercredi 1er juin 2022 au prix de 72,33 €/MWh pour fermer vendredi 1er juillet à 101,02 €/MWh, soit une hausse de 39,67 %.

L’augmentation a légèrement diminué la semaine suivante à 30,48 % pour atteindre un prix de 131,81 €/MWh le 8 juillet 2022, soit une variation totale de 82,23 %.

Court-terme : l’actualité du gaz naturel fut dense sur le mois de juin. Si les 10 premiers jours du mois de Juin ont été plutôt calmes, c’est à partir du 14 Juin et le retour de l’actualité russo-ukrainienne que le point d’orgue est clairement marqué par une montée en puissance de la rhétorique antagoniste. Cette dernière alimente les spéculations sur une dégradation pérenne de la relation entre la Russie et l’Europe occidentale.

Nos notes précédentes l’évoquaient :

  • Indisponibilité du terminal méthanier de Freeport (USA) prolongée à 3 mois ;
  • Compresseur défectueux sur Nordstream 1 ;
  • Baisse progressive des flux alimentant l’Europe ;
  • Passage de l’Allemagne à l’étape 2 du plan d’urgence Gaz ;
  • Quasi-arrêt des exportations via Nordstream 1 en fin de mois.

Tous ces éléments ont achevé de propulser les cotations mensuelles de gaz naturel à des niveaux plus vus depuis décembre dernier. Ainsi, le produit « Août 2022 » connait une croissance de près de 95 % sur la période passant d’une gamme de prix stabilisée aux alentours des 73 €/MWh à près de 142 €/MWh au PEG. La fin juin 2022 est ponctuée par une grève de quelques jours sur les plateformes norvégiennes apportant soutien à la flambée des prix. Mais c’est vers le 11 juillet que convergent les regards à l’approche de la maintenance annuelle du pipeline Nordstream 1 prévue initialement pour une durée de 10 jours mais avec la crainte que le bras de fer engagé par la Russie et l’Europe n’aboutisse à l’interruption pure et simple de l’approvisionnement sans calendrier de redémarrage.

Ainsi il y a quelques jours, un chef stratégiste d’une grande banque européenne se demandait si le 22 juillet ne serait pas le jour le plus important de l’année, représentant un point focal pour l’ensemble de l’économie européenne à venir.

L’Europe reste focalisée sur la constitution de ses réserves stratégiques d’ici au 1er novembre 2022 afin d’envisager l’hiver prochain de manière moins nerveuse. Cette demande soutient naturellement les prix et semble perdurer dans les prochaines semaines où toute mauvaise nouvelle serait très défavorablement accueillie par le marché.
Pour paraphraser Robert Habeck, ministre de l’économie allemand : « Chaque kWh compte dans cette situation »

Long-terme : les cotations plus éloignées subissent également les impacts de cette incertitude portant la hausse à près de 40 % sur Cal 2024 et 12% sur Cal25 au PEG.

 

 

Revue mensuelle juin et début juillet 2022 : vers la nationalisation d’EDF

Nous sommes le 13 juillet. Notre revue mensuelle est particulièrement dense cette fois ci puisqu’elle prend en compte les actualités du mois de juin ainsi que celles de la première semaine de juillet.

Que s’est-il passé en ce début d’été ? Quelles informations essentielles ont influencé les marchés  ? Une chose est certaine, nous ne nous sommes pas ennuyés.

  • L’État qui a l’intention de détenir 100 % du capital d’EDF ;
  • La France qui a évité un an de gaz à effet de serre en 20 ans ;
  • Le pays du nucléaire qui va se remettre au charbon ;
  • TotalEnergie, EDF et Engie qui appellent les Français à moins consommer ;
  • La Cour des comptes qui remet en cause le fonctionnement de l’ARENH.

Nous revenons sur les faits qui ont marqué le début de la saison.

L’État a l’intention de détenir 100 % du capital d’EDF

La renationalisation d’EDF est sur toutes les lèvres, surtout depuis le discours de politique générale du 6 juillet de la Première ministre Élisabeth Borne dans lequel elle confirme cette volonté. « Cette évolution permettra à EDF de renforcer sa capacité à mener dans les meilleurs délais des projets ambitieux et indispensables pour notre avenir énergétique. » dit-elle devant l’Assemblée nationale.

Derrière cette volonté de nationaliser, l’État souhaite aller plus vite face à la crise énergétique, être maître en sa demeure et entamer plus sereinement les discussions avec la Commission européenne qui sera très regardante sur le respect de la concurrence et donc sur la régulation du nucléaire.

 

La France pourrait devenir importatrice nette d’électricité cet été

C’est ce qu’avait en tout début de mois de juin déclaré la société Energy Qualified (EQ) du groupe Montel. En effet, les importations nettes pourraient atteindre « 1,5 TWh en juin, 2,1 TWh en juillet et 2,2 TWh en août, totalisant 5,8 TWh ». Cette situation, en été, n’était pas arrivée depuis 20 ans.

Au mois de novembre 2021, la France avait déjà été importatrice nette après qu’EDF ait arrêté l’activité de 5 réacteurs. L’estimation de l’été prochain est la conséquence de la baisse de production possible à la suite des problèmes de réacteurs en maintenance.

La France a évité un an de gaz à effet de serre en 20 ans

L’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) a publié un rapport sur les bénéfices climatiques et économiques du déploiement des énergies renouvelables de 2000 à 2020. Et c’est donc 1 an d’émissions de gaz à effet de serre évité.

La part des Énergies Renouvelables (ENR) dans la consommation en France a augmenté ces dernières années, la conséquence d’un effort pour progressivement se séparer des énergies fossiles et d’une accélération due au contexte russe. Solaire, hydraulique, éolien, biocarburants… Si en 2005, les ENR représentaient 9,3 % de nos consommations d’énergies, en 2020 elles sont passés à 19,1 %. L’étude reconnait cependant un bémol, celui du développement du renouvelable par les agrocarburants qui n’a pas un bilan carbone neutre.

Le bilan est tout de même positif puisqu’entre 2000 et 2019, ces efforts dégagent une économie de 22 milliards d’euros sur la facture énergétique française. L’ambition française est d’atteindre une part d’ENR comprise entre 32 et 35 % ; ce n’est donc qu’un début.

Notre pays ne reçoit plus de gaz russe via Nord Stream 1

Vendredi 17 juin, le gestionnaire du réseau français GRTGaz annonçait que, depuis le 15 juin, plus de gaz ne transitait depuis la Russie via le gazoduc Nord Stream. Juste avant, Gazprom avait diminué de 40 % ses livraisons en direction de l’Allemagne, le débit a diminué également en Autriche et en Italie, le robinet avait également été coupé en Pologne, Finlande et Bulgarie, c’est désormais la France qui ne reçoit plus.

La France est dépendante de la Russie pour son gaz à hauteur d’environs 17 % d’après GRTGaz.

Le pays du nucléaire va se remettre au charbon

La centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle, va probablement redémarrer l’hiver prochain. C’est ce qu’avait annoncé, dimanche 26 juin, le ministère de la Transition énergétique. Le gouvernement, lors de la fermeture initiale du site le 31 mars dernier, n’avait pas exclu l’idée de le rouvrir ponctuellement afin d’assurer l’approvisionnement en électricité du pays.

Aussitôt fermée, aussitôt rouverte, nous sommes donc très loin d’être surpris de cette décision qui arrive dans un contexte de forte tensions sur le marché de l’énergie. Un décret va être mis en consultation pour remettre la centrale à charbon en marche. Il y sera question de mettre en place des contreparties environnementales comme des projets de reforestation afin de « contrebalancer » les fortes émissions de CO2 issues des centrales à charbon.

TotalEnergie, EDF et Engie appellent les Français à moins consommer

Dimanche 26 juin, les dirigeants des trois géants énergéticiens appellent d’une seule voix les français à « immédiatement » réduire leur consommation de pétrole, de carburant, d’électricité et de gaz en prévision du risque de pénurie et de flambée des prix l’hiver prochain. C’est dans une tribune diffusée par le Journal du dimanche (JDD), que Catherine MacGregor (Engie), Jean-Bernard Levy (EDF) et Patrick Pouyanné (TotalEnergies) expriment leurs difficultés d’approvisionnement et l’objectif de 100 % de stockages de gaz d’ici au début de l’automne.

La Cour des comptes remet en cause le fonctionnement de l’ARENH

La cour des comptes a sorti son rapport le 5 juillet 2022 à propos de l’organisation des marchés de l’électricité.

Ce rapport, pour le moins explosif, souligne que les dispositifs de la politique publique d’organisation des marchés de l’électricité ne « permet plus de garantir que les objectifs initiaux soient atteints ».

La cour des comptes cible les dispositifs de la loi Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité (NOME) et ses objectifs :

  • Permettre l’exercice de la concurrence entre fournisseurs ;
  • Garantir aux consommateurs des prix stables et reflétant la compétitivité du nucléaire existant ;
  • Assurer le financement de ce parc et disposer de capacités suffisantes pour garantir l’équilibre entre offre et demande d’électricité.

ARENH, TRV, le rapport met en exergue l’échec des dispositifs avec l’illustration du contexte actuel de flambée des prix du gaz et de l’électricité.

Des consommateurs s’attaquent au fournisseur d’électricité Mint Energie

L’association de consommateurs Consommation, Logement et Cadre de vie (CLCV) vient d’engager une action de groupe contre le fournisseur d’électricité Mint Energie.

Ce sont, en tout 9 consommateurs qui témoignent au dossier et reprochent au fournisseur d’avoir changé les offres de ses clients le 1er novembre 2021 « sans le consentement exprès et préalable des consommateurs ».

De son côté, le fournisseur indique avoir respecté le préavis légal d’un mois en envoyant un premier mail puis quatre autres e-mails ainsi qu’un SMS.

Un bouclier tarifaire remplacé par des aides plus ciblées.

Le bouclier tarifaire sur les prix de l’énergie a de fortes chances d’être remplacé par des aides très ciblées à destination des Français les plus modestes.

Elisabeth Borne et Bruno Le Maire se sont exprimés en marge des Rencontre économiques d’Aix. Le Ministre de l’économie souligne « qu’il faut aider ceux qui en ont réellement besoin ». Cette phrase sous-entend-t-elle qu’actuellement l’aide profite à ceux qui pourraient s’en passer ?

La Première ministre, interrogée sur l’opportunité de mettre en place une taxe sur les « surprofits » que réaliseraient les énergéticiens en ces temps de hausse des prix, sa réponse reste évasive. En effet, si dans un premier temps elle affirme que des surprofits liés à ces surcoûts devraient « profiter à tout le monde », dans un second temps son propos est nuancé par « Après, c’est pas complètement simple ».