Une dernière revue mensuelle avant la pause estivale
Il n’y aura pas de note de marché hebdomadaire durant les deux prochaines semaines. Nous revenons après cette pause, encore plus déterminés à vous donner les dernières actualités du marché.
Cette note de marché commence au 1er juillet et se termine le jeudi 28 juillet exceptionnellement. Bonne lecture !
Drivers
Analyse et chiffres clés des marchés en France
Électricité
Le CAL BL 2023 a démarré le mois de juillet à un prix de 364,29 €/MWh. Jeudi 28 juillet le prix était à 499,5 €/MWh, soit une hausse de 37,12 %.
Court-terme : les cotations hivernales sont celles ayant le plus réagi aux différents développements liés à la sécurité d’approvisionnement des mois à venir : maintenance de Nord Stream 1, réduction des flux de gaz russe et nécessité d’injection dans les stockages souterrains de gaz naturel.
Si le Q4 2022 (trimestre 4) avait déjà rejoint ses plus hauts niveaux relativement tôt en juillet portant la marque en Baseload autour des 850 €/MWh et Peakload (livraison 8h-20h en journée) à 1600 €/Mwh, c’est la cotation Q1 2023 (trimestre 1 de 2023) qui connait une hausse régulière tout au long du mois de juillet. Ce trimestre, traditionnellement le plus froid de l’année, flirte en fin de mois avec les 950 €/MWh en baseload et 1800 €/MWh en Peakload (livraison 8h-20h en journée). Des niveaux de prix qui incitent à une réflexion dans toutes les branches industrielles sur la pérennité économique des différentes activités au plus fort de la demande électrique.
Long-terme : le Cal 2023 réagit mécaniquement à la hausse de Q1 2023 pour rejoindre en fin de mois les 500 €/MWh, du jamais vu, bien entendu.
À noter, en particulier, la grande disparité des prix au sein même de l’année 2023. Si le trimestre 1 pointe désormais à 950 €/MWh, Q2 et Q3 se stabilisent autour des 300 €/MWh. Un différentiel extrême entre les cotations hivernales laissant présupposer que le marché sur-anticipe des difficultés au plus fort de l’hiver. Cette concentration de la prime de risque sur une seule période rend le positionnement délicat, tant que les spéculations et commentaires vont bon train sur les difficultés réelles de notre système électrique à passer sans dommage cet hiver.
Nombre de dirigeants et décisionnaires réévaluent actuellement les projections budgétaires et plan de production afin d’atténuer les effets délétères de ce marché hautement psychologique à l’heure actuelle. Le Cal 2024 quitte son palier des 200 €/MWh pour atteindre les 250 €/MWh poussé par la fébrilité des cotations 2023 dans l’attente de plus d’informations sur la teneur de cet hiver et les possibles répercussions sur le plus long terme.
Gaz
Le TTF 2023 a démarré le mois de juillet à un prix de 108 €/MWh. Jeudi 28 juillet le prix était à 149,958 €/MWh, soit une hausse de 38,85 %.
[NDLR : nous enrichissons, depuis peu, notre note de marché avec l’évolution mensuelle du prix PEG puisque ce dernier est actuellement plus intéressant que le TTF]
Le prix PEG CAL 2023 a ouvert vendredi 1er juillet à un prix de 101,02 €/MWh. Jeudi 28 juillet le prix était à 141,958 €/MWh, soit une hausse de 40,52 %.
Court-terme : « l’été, le gaz est moins cher ». Jamais cette « légende » circulant parfois dans les cercles d’acheteurs n’aura été aussi fausse que cette année. Malgré une demande moindre qu’en hiver, les cotations estivales atteignent des sommets. La livraison de gaz naturel pour août 2022 avoisine en cette fin de mois les 140 €/MWh après une pointe jusqu’à 150 €/MWh sur le PEG. La zone France est mieux lotie que ses voisines puisque le TTF atteint, lui, la marque des 200 €/MWh. Une hausse de près de 130 % depuis la mi-juin et le durcissement du ton entre l’Union Européenne et la Russie, disposant actuellement de leviers forts mettant fortement à mal un partenariat historique dont le souvenir nous semble déjà lointain.
Chaque semaine, si ce n’est jour de cotation, apporte son lot de phrases, commentaires et rhétorique de part et d’autre au centre desquelles le marché tente de déceler une réalité physique. Les traders naviguent entre les épisodes d’observation des flux sur les différents points d’interconnexion gazière, l’interprétation des communiqués, le décryptage du voyage de la turbine de retour du Canada ainsi que de son prochain remplacement. Difficile de ne pas penser à de la communication digne d’un temps de guerre tant les parties en présence restent focalisées sur des signaux faibles.
Une réalité cependant : une concurrence forte entre l’Asie et l’Europe pour la sécurisation de l’approvisionnement en GNL à l’horizon du dernier trimestre 2022 et la nécessité d’injecter suffisamment de gaz naturel dans les stockages continentaux européens.
Long-terme : par le même mécanisme de contagion que sur les marchés de l’électricité, la cotation Cal 2023 cherche un nouveau palier de stabilisation dans ce contexte et rejoint le niveau des 135 €/MWh. Moins sujette à cette folie court-termiste, la cotation Cal 2024 reste stabilisée depuis début juillet autour des 85 €/MWh dans l’attente de nouveaux éléments.
Revue mensuelle de juillet 2022 : EDF a subi une perte historique de 5,3 milliards d’euros au premier semestre
Nous sommes le 1er août. Place à notre revue mensuelle.
Que s’est-il passé durant le mois de juillet ? Quelles informations essentielles ont influencé les marchés ? Une chose est certaine, nous ne nous sommes pas ennuyés.
- Les annonces du gouvernement qui concernent les risques de pénuries de l’hiver prochain ;
- L’assemblée qui vote l’augmentation du prix de l’ARENH pour 2023 ;
- L’Allemagne qui rassemble 15 milliards d’euros afin de sauver le géant Uniper ;
- EDF qui communique une perte historique de 5,3 milliards d’euros au premier semestre ;
- Le rapport de la CRE qui indique des prix à terme « fous » de l’électricité pour l’hiver 2022-2023 et l’année 2023 ;
- TotalEnergies qui annonce un bénéfice de 5,7 milliards de dollars ;
- Casino qui cède Green Yellow pour 1,4 milliard d’euros.
Nous revenons sur les faits qui ont marqué le mois dernier.
Les annonces du gouvernement concernant les risques de pénuries de l’hiver prochain
L’Europe continentale se retrouve dans une situation inédite pour l’hiver prochain : une éventuelle coupure totale de gaz russe. Elisabeth Borne et Bruno Le Maire se sont exprimés à propos des mesures envisagées par la France.
- Poursuivre le remplissage des stocks : diversification des sources d’approvisionnement en gaz et redémarrage de certains réacteurs aujourd’hui à l’arrêt ainsi que la réouverture de la centrale à charbon de Saint-Avold ;
- Prioriser sur les ménages et certaines industries : en cas de manque, priorité sera faite sur les ménages, les usines et les transports en commun. Certains sites industriels devront ralentir voir effectuer de l’effacement ;
- Baisser la consommation d’énergie de 10 % : en améliorant la sobriété énergétique dans l’administration, les entreprises et les établissements recevant du public ;
- Proposer des aides ciblées : remplacement du bouclier tarifaire par des aides ciblées pour les français les plus modestes ;
- Augmenter les factures des foyers les plus aisés : ce dernier point est plus ambiguë de la part de Bruno Le Maire, mais il serait question, en cas de très forte augmentation des prix – recommandée par la CRE – que certains ménages seraient plus en mesure d’absorber la hausse que d’autres.
L’assemblée a voté l’augmentation du prix de l’ARENH pour 2023
Dans la nuit du jeudi 21 juillet au vendredi 22 juillet, les députés ont approuvé le relèvement du prix de l’ARENH à compter du 1er janvier 2023 mais sans en augmenter le plafond. C’est la coalition de votes des oppositions qui a permis l’adoption de cet amendement à 167 voix pour et 136 contre.
L’AFP indique que « ce vote a eu lieu dans le cadre de l’examen en première lecture du projet de loi d’urgence en faveur du pouvoir d’achat qui contient un volet énergétique. » Il faut désormais attendre le passage au Sénat pour savoir si ce projet sera confirmé.
L’Allemagne rassemble 15 milliards d’euros afin de sauver le géant Uniper
Olaf Scholz a annoncé le mois dernier l’intervention de l’Allemagne pour sauver Uniper, premier importateur de gaz russe du pays. Berlin détiendra 30 % du capital. À cette intervention exceptionnelle, s’ajoute le fait que l’énergéticien va répercuter en octobre au plus tard, 90 % des coûts supplémentaires liés aux achats de gaz effectués en compensation des 60 % russes manquants.
Selon le chancelier allemand, cette répercussion pourrait représenter de « 200 à 300 euros pour une famille de quatre ».
EDF communique une perte historique de 5,3 milliards d’euros au premier semestre
L’année 2022 est pour le moins compliquée pour EDF. Réacteurs à l’arrêt, guerre en Ukraine… alors la France engage un processus de nationalisation, le géant énergéticien annonce une perte de 5,3 milliards d’euros au premier semestre.
D’après Jean-Bernard Lévy, le président du groupe, cette perte est historique et serait la conséquence de difficultés de production nucléaire, hydraulique (dans une moindre mesure) ainsi que le bouclier tarifaire du gouvernement, imposant à EDF de vendre plus d’électricité ARENH.
Rapport de la CRE : les prix à terme « fous » de l’électricité pour l’hiver 2022-2023 et l’année 2023
La Commission de Régulation de l’Énergie a sorti son rapport de juillet 2022 sur les prix à terme de l’électricité pour l’hiver 2022-2023 ainsi que l’année 2023.
Sans surprise, le rapport indique que l’Europe a connu une hausse record des prix à terme qui s’est accélérée très fortement depuis mi-juin 2022. Cette hausse est particulièrement marquée en France.
Selon ce rapport, cette hausse est la conséquence de deux crises affectant le secteur énergétique européen et français depuis le deuxième semestre 2021 :
- L’invasion de l’Ukraine par la Russie qui déstabilise la sécurité des approvisionnements en gaz de l’Europe et la France ;
- L’état d’usure du parc nucléaire français. Les phénomènes de corrosion sous contrainte, ainsi que les maintenances ont conduit à plusieurs arrêts.
La France connaît des prix à terme plus élevés que le reste de l’Europe. Cette différence serait le reflet de « la crainte des marchés quant au risque d’un déséquilibre offre/demande sur les marchés de l’électricité en France cet hiver. » La CRE annonce qu’elle renforce, dans ce contexte, sa surveillance du marché de gros français mais n’observe pas de « comportement susceptible de relever de la manipulation de marché sur les prix à terme de l’électricité ».
La conclusion du rapport nous informe que la CRE va interroger les acteurs de marché à propos de leurs stratégies et leurs anticipations pour l’hiver à venir.
TotalEnergies annonce un bénéfice de 5,7 milliards de dollars
C’est en toute détente que TotalEnergies a réalisé un bénéfice net de 5,7 milliards de dollars sur le 2e trimestre 2022.
Ces forts profits sont en partie dus aux cours du pétrole et du gaz en hausse à cause de la guerre en Ukraine.
Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné a affirmé, lors d’une conférence destinée aux analystes financiers que « Nous sommes clairement dans un environnement très positif et dynamique marqué par des cours élevés des matières premières. Cela pourrait continuer à moyen terme à notre avis ».
Ces gains avaient alimenté en France l’opportunité de taxer TotalEnergies sur ses superprofits mais le gouvernement a refusé de le faire.
Le groupe Casino cède Green Yellow pour 1,4 milliard d’euros
Le groupe Casino, Tikehau et Bpifrance ont signé le 27 juillet une promesse unilatérale d’achat avec Ardian Infrastructure pour une cession d’une participation majoritaire dans GreenYellow.
GreenYellow est spécialisé dans les énergies renouvelables.